MERCURY. 55 CD 478 5092
DECCA. 50 CD 478 5437
WESTMINSTER. 40 CD 479 2343
Universal vient de publier coup sur coup trois coffrets cubiques
qui titillent la fibre nostalgique des discophiles.
En tout juste un trimestre, Universal a réédité 55 CD du catalogue Mercury (Mercury Living Presence, The Collector’s Edition, volume 2), 50 CD de l’histoire de Decca (Decca Sound, The Analogue Years) et, plus récemment, 40 CD synthétisant l’histoire du label Westminster.
Nous avons déjà évoqué brièvement, avant les Fêtes, l’existence des coffrets Mercury et Decca, tous deux très recommandables. Il faut y revenir ici, puisque tous deux, flattant la fibre nostalgique, préparent admirablement le terrain au retour des enregistrements Westminster.
Mercury
Le label Mercury est né en 1951 à l’instigation du preneur de son Bob Fine. Après une phase monophonique (1951-1955), Mercury, qui s’est délité au tournant des années 70, a connu ses heures de gloire au début de la stéréophonie, les enregistrements Living Presence étant en avance sur leur temps et documentant des artistes aussi exaltants qu’Antal Dorati ou Paul Paray. La veuve de Bob Fine, Wilma Cozart-Fine, pilota avec une conscience professionnelle hors normes, entre 1991 et 1999, la politique de rééditions en CD.
Les enregistrements Mercury, très francs, ont un impact et un punch intact, cinquante ans après leur publication. En deux coffrets, Universal a emboîté les titres précédemment parus, mais ne prolonge pas le travail de Wilma Cozart, disparue depuis. Les vrais collectionneurs, qui attendent une exploration accrue du legs monophonique, vont être amèrement déçus. Seul, ici, un CD bonus nous offre la version monophonique (1953) du Sacre du printemps par Dorati. Malgré cette déception, le coffret est musicalement exaltant.
Decca
Après le succès d’un coffret bleu et rouge « The Decca Sound », voici une version noir et blanc de 50 CD d’enregistrements de l’ère analogique, de la Symphonie Antar de Rimski-Korsakov par Ernest Ansermet en mai 1954 aux Poèmes symphoniques de Saint-Saënsavec le Philharmonia et Charles Dutoit en juin 1980.
Decca aussi possède une réelle aura en matière de prise de son. On ne sait pas, toutefois, si les enregistrements ont été choisis pour leurs vertus techniques particulières. En tout cas, le point intéressant de ce coffret est que l’éditeur est, çà et là, allé fouiller dans quelques coins obscurs de ses archives : concertos de Surinach et Montsalvatge par Larrocha, Copland et Gershwin dirigés par Mehta, Secret de Susanne de Wolf-Ferrari par Santi, Rosamunde de Schubert par Munchinger, Offenbach et Massenet par Bonynge, Martin et Honegger par Ansermet, Rossini dirigé par Piero Gamba…
Moins « historique » que Mercury, mais souvent passionnant.
Westminster
Les 20 % de raretés du coffret Decca ne suffiront peut-être pas aux vrais collectionneurs. Pour eux, voici les 40 CD de The Westminster Legacy – Collector’s Edition. Né en 1949, à New York, et actif jusqu’en 1965, le catalogue Westminster a promu, sur le plan sonore, la « balance naturelle », repoussant, comme Mercury, la technique de prise de son multi-micros. Westminster, qui n’a pas misé sur l’excellence technique, est venu assez tard à la stéréo et tire plutôt son aura d’avoir eu, dans les années 50, Vienne comme centre artistique névralgique de son activité, avec quelques noms majeurs : Hermann Scherchen ou le Wiener Konzerthaus Quartet. Les autres quatuors sont les Amadeus, Smetana, Janácek. Les chanteurs sont alors Sena Jurinac, Leopold Simoneau, Maria Stader et Beverly Sills.
Pour la première fois hors du Japon, les LP Westminster sont republiés avec la reproduction des pochettes originales. Cette boîte de 40 CD opère une sélection dans les répertoires symphonique, de musique de chambre et de musique vocale. À l’opposé de cette stratégie, Universal Corée réédite l’intégralité du catalogue Westminster en 65 CD symphoniques, 58 CD chambristes — le coffret vocal restant à venir. Le nectar est ici signé Hermann Scherchen. Ces rééditions Westminster prouvent néanmoins qu’on aurait tort de fantasmer l’existence, dans les années 50, d’une sorte d’âge d’or de la musique de chambre. Objectivement, les quatuors n’ont jamais été aussi raffinés et affûtés qu’aujourd’hui, comme le montrent les Prazak, Artemis, Takacs, Hagen et autres. Maintes captations (cf. Franck par Jörg Demus) font clairement leurs 50 ou 60 ans dans cette photographie sonore un peu sépia qui plaira aux nostalgiques invétérés.
Source: Le Devoir