You are currently viewing Isabeau Corriveau et les tisseurs de rêves – A Leap of Faith

Une visite à la musique irlandaise,
version harpe, made in Québec?

Album: A Leap of Faith
Artiste: Isabeau Corriveau et les tisseurs de rêves

En test: 2019; Vinyle; 180g

Étiquette: Autoproduit; CA-LMJ-19-40000

Ceux qui me lisent depuis quelques années (ces jours-ci plus rarement hélas) savent à quel point j’ai un intérêt pour les artistes qui se donnent à 100 % pour leur Art et suis enjoué et tente de publiciser ceux qui s’autoproduisent. Beaucoup essaient et ne réussissent pas : la musique reste un jeu. Pour d’autres, ils trouvent quelques débouchés à jouer de la musique. Et finalement, certains ont la chance de percer et de vivre de leur art. Tout ceci, bien évidemment, ne repose que sur la chance, aidé par le talent. Mais plus on travaille dans un milieu, plus on essaie, plus on se donne, et plus on laisse d’opportunités à la chance de nous sourire. Lors des derniers Salon Audio de Montréal et Salon Audio de Toronto, j’ai pu rencontrer plusieurs de mes amis artistes qui viennent nous visiter de l’autre côté de la scène et des microphones. Je ne citerai que Vincent Bélanger, qui travaille au projet des tisseurs de rêves en plus de ses projets personnels au violoncelle. Je citerai aussi Anne Bisson pour laquelle j’ai enfin pu acheter quelques-uns des disques ; une figure énigmatique a été présente dans les lobbys des deux événements, à jouer pour la foule présente : il s’agit de la joueuse de harpe Isabeau Corriveau. Il y a bien évidemment une satisfaction que de jouer de son instrument face à un public et de pouvoir parler avec ceux qui n’avaient jamais entendus parler de vous, mais il y a aussi la difficulté de jouer en musique de sourdine pour un événement entier dont les gens viennent écouter le virtuel, et non l’instrument réel.

Quand j’écrivais de laisser des opportunités à la chance, c’est de ça que je parle. De jouer dans différentes salles dans différents événements privés, éventuellement de se faire découvrir par Eon Art et Oracle Audio. Ces derniers décidèrent de contribuer à la réalisation du premier disque vinyle de Mme Corriveau, de lui donner des opportunités de jouer ses pièces, seule ou en groupe, à plusieurs de leurs soirées d’écoute. Que j’aime ou déteste la harpe n’est d’aucun intérêt à ce point : cette personne fait le maximum pour jouer de ses instruments et mérite tout mon respect en tant qu’artiste, sur un instrument qui n’est pas commun en plus. Et de ne mentionner que les Festivals Audio est réducteur. On peut l’entendre à la télévision, en collaborations, en festivals de musique ancienne et celtique, co-fondatrice de l’ensemble l’Harmonie des saisons. La harpiste se produit partout à travers la planète, en plus d’enseigner la harpe et de se spécialiser en harpes historiques. Que de parcours depuis son premier disque autoproduit, une collaboration avec sa sœur, la non moins exceptionnelle violoncelliste, flutiste et gambiste Mélisande Corriveau !

Et sur A Leap of FaithIsabeau Corriveau multiplie les raisons d’aimer son disque. Musique foncièrement celtique, mais aussi un peu anglaise, elle s’est entourée d’excellents musiciens et ne reste pas dans le moule traditionnel de la musique classique, ni se limite uniquement à la harpe. Certaines pièces sont avec chants, flute, voix; d’autres avec une guitare électrique. L’élément conducteur de l’album est Mme Corriveau elle-même, qui participe à chacune des pièces, mais la harpe n’est que présente que lorsque nécessaire. C’est d’ailleurs tout un traitement d’adaptation des pièces parfois traditionnelles, parfois modernes, que la compositrice a su relever avec brio. Pour ceux qui ont peur que le disque ne soit monotone, au contraire, il détonne carrément des interprétations habituelles et sait nous emmener dans un univers très passionnant. Cet univers n’est pas laissé au hasard, il s’agit d’un savant travail de la part de Stephan Ritch (entre autres à la production, prise de son, musicien, etc), de Caroline St-Louis et d’Isabeau Corriveau sur une période de plus de six mois, sans compter les autres grands musiciens ayant travaillé d’arrache-pied sur le projet. Ce n’est pas pour rien que la version numérique soit aussi réussie que celle en vinyle.

Et côté qualitatif, pour le vinyle, c’est très facile d’entrer dans les superlatifs, après tout, on a ici un des rares disques produits de concert avec l’excellente entreprise québécoise de confection de sources Oracle Audio, avec un intérêt tout particulier de leur partenaire Eon Art. C’est rigoureusement certain qu’ils n’allaient pas laisser passer un canard boiteux avec leur signature. Le disque, sans prétention, est d’une simplicité désarmante. La gravure du disque vinyle de Guy Hébert est raffiné et ne détonne pas, mais peut parfois surprendre par une fréquence apparaissant d’un seul coup, comme si le disque avait été surtout préparé pour une écoute de tous le jours et non une écoute active. Le disque 180g, bruyant aux premiers abords, nécessite un petit nettoyage afin de faire ressortir tout le lustre de la gravure. Sobre avec un certain raffinement, le disque nous transporte d’un univers à l’autre d’une façon naturelle. Il s’agit manifestement d’un travail très personnel de la part de l’artiste, qui a d’ailleurs gravé le vinyle de sa signature en approbation. Ce n’est pas le genre de disque qui dépeigne à l’écoute, mais c’est un très beau disque avec une sonorité très naturelle qui mérite plusieurs écoutes et pour lequel j’ai eu à dire à ma fiancée «il faut que tu écoutes ça!»

Excellent travail !

Achats via le site web d’Isabeau Corriveau Page pour le disque vinyle

Correctifs de l’auteur (24 décembre). J’ai pris la décision de modifier quelques éléments de l’article. Le but de la critique étant de discuter de la qualité du disque vinyle spécifiquement, sous le format habituel d’un paragraphe de focus sur les artistes et la stylistique, un paragraphe du positionnement de l’Œuvre dans les différentes carrières, et un paragraphe de critique du disque vinyle lui-même versus la version numérique ou dématérialisée. Loin de moi l’idée de laisser dans l’ombre les excellents collaborateurs ayant travaillé sur ce disque. Joyeuses fêtes!