Le regretté bluesman québécois sur vinyle, enfin!
Album : Bob Walsh Collection
Artiste : Bob Walsh
En test : 2019; Vinyle
Étiquette : Disques Bros;
BROS11085
Il y a parfois des gens qui restent dans l’ombre et qui ne le devraient pas. Bob Walsh a fait d’innombrables spectacles dans ses plus de 40 ans de carrière. De plus, il a été un de ceux qui n’ont jamais été frileux de faire grimper des nouvelles têtes sur scène. Que ce soit Guy Bélanger, son harmoniciste de toujours, Steve Hill ou Jonas, beaucoup ont participé aux concerts de Bob Walsh, qui a été une influence claire de tout bluesman dans le Québec. Un peu plus de deux ans après son départ, le magasin Audio d’Occasion, célébrant ses 33 années de service, se payent un premier 33 tours du grand homme.
Lorsque j’ai dit à ma fiancée que j’allais écrire une critique sur un album compilation de Bob Walsh, elle était encore plus excitée que moi. C’est qu’il a fait partie des meubles de Montréal et à travers le Québec. On le voyait régulièrement, il était toujours disponible et, malgré sa timidité en dehors de feux de la scène, il est toujours resté présent et visible dans nos vies. Innombrables visites au Festival de Jazz, innombrables spectacles dans des bars sur Saint-Denis, albums réguliers. Il a fait partie de nos vies.
Cet album est bien évidemment une compilation, avec des succès spectacle et surtout studio, le tout enregistré numériquement à l’origine. Le travail de matriçage d’Anne-Marie Sylvestre (connue par les audiophiles pour sa collaboration de longue date avec l’étiquette Fidelio) est donc d’autant plus complexe qu’elle n’a pu contrôler les sources, qui sont toutes aussi variées les unes que les autres. Malgré la complexité du projet, elle a su, encore une fois, prouver à quel point elle est une artiste du matriçage redoutable.
Le disque s’écoute comme s’il avait été enregistré hier. Les instruments sont beaux, naturels. La voix de Walsh, parfois douce, parfois forte, est mise en vedette sans être en avant-plan (comme l’Homme lui-même). Et comme le disque vinyle ressort exactement les sonorités que le blues a besoin (comparativement à des CD qu’on peut juger trop propres), c’est une joie sans bornes que d’écouter ce disque, ma foi trop court. On aurait pris une discographie complète tellement le produit s’écoute bien. Je soupçonne le disque d’être très facile à jouer, les sillons sont profonds, la gravure est franche, il n’y a pas de bruit de fond, la qualité y est à tous les niveaux.
Je peux reprocher un côté sourd à la voix de temps en temps, dépendant de l’album source, mais c’est mineur. Le côté consensuel ne fait aussi pas ressortir les couilles qui sont parfois appréciées pour le gros blues sale : tout est à sa place, tout est beau, tout est presque trop gentil. On est très loin de la crasse de Blue & Lonesome des Rolling Stones, on est loin du Delta Blues en général, des cris du cœur du chanteur. On n’a pas la douleur des dernières années-cigarette d’une Vaughan, une douleur alcoolique de Joplin. Mais on est aussi dans le même registre déférent et dansant que Georges Thurston (Boule Noire), avec un blues qui possède une part de funk, qui est fait pour le spectacle, avec autant de la tristesse dans les paroles que le sourire au visage à l’écouter. Avec une même force après la maladie de son album After The Storm. J’aurais peut-être préféré une conversion à l’analogique et une gravure faisant ressortir un peu plus des instruments électriques, par exemple une gravure DMM qui aurait été peut-être préférable dans ce cas-ci. Peut-être que le petit rehaussement des extrêmes hautes fréquences et la force des basses légèrement écrêtées d’un ruban à 15 pouces par seconde auraient exacerbé ce petit côté crasse qui est peut-être manquant, ce n’est pas un album classique après tout. Mais quand on est rendus là dans la discussion, c’est plus une question de goûts personnels que de technique.
N’empêche, ce projet est une aussi belle déférence et un aussi beau premier salut en vinyle que l’équipe aurait pu faire. Ce sont des admirateurs de Bob Walsh qui ont réalisé ce projet et ça paraît. Que ce soit Larry O’Malley qui a enregistré la majeure partie de ses disques, Mario Gagnon et René Moisan qui ont produit la majeure partie de ses disques, et le tout avec la bénédiction de sa famille. Quel disque! Laissez faire les disques compacts, le roi est en vinyle!
* Petite note de bas d’article: il existe bien quelques disques vinyles auquel Walsh a participé, mais il s’agit d’une trame sonore de film et un disque-souvenir d’un spectacle auquel il a participé. Rien à voir avec ses albums!
Le vinyle est en vente chez: https://www.hifipro.ca/fr