Le retour de l’enfant Prodigue

La compagnie Sharp est bien connue pour ses téléviseurs ACL. Véritable chef de file dans le domaine, sa série Aquos est reconnue dans le monde entier. Ce que peu de gens savent, c’est que Sharp fut le premier constructeur à offrir un projecteur de technologie DLP spécialement conçu pour le cinéma maison. Le XV-Z9000 de Sharp annoncé en grande pompe en novembre 2001 était une véritable révolution avec sa définition HD (1 280 x 720) et son format 16:9.

Je me souviens moi-même d’avoir salivé à l’idée de posséder un projecteur Sharp. Le boîtier distinctif fut conservé pour chacun des nouveaux modèles par la suite. Les Sharp XV-Z10000 (décembre 2002), Sharp XV-Z12000 (décembre 2003), Sharp XV-Z12000 MARK II (novembre 2005) et finalement le Sharp XV-Z20000 (octobre 2006). Malgré leurs grandes qualités, les projecteurs Sharp ont eu beaucoup de difficulté à se distinguer vis-à-vis la compétition féroce livrée par les projecteurs ACL. Lorsqu’aucun nouveau produit cinéma maison ne fut annoncé en décembre 2007, plusieurs ont clamé haut et fort que Sharp avait abandonné le créneau, faute de profitabilité.

Le XV-Z15000 de Sharp, qui ne fit son apparition qu’en début 2009, fut donc une grande surprise. Cette fois-ci, Sharp semble avoir changé de stratégie. Le XV-Z15000 se veut plus abordable avec un boîtier emprunté à la série affaires.

Le projecteur possède une résolution de 1 920 x 1 080 ainsi qu’un iris dynamique. Du jamais vu, pour un DLP de ce prix. Un deuxième iris permet de mieux ajuster la luminosité et de présenter d’avantage de contraste. La roue de couleurs est à six segments et tourne à 5 X. Étant déjà propriétaire d’un projecteur XV-Z20000 de Sharp (voir Québec Audio & Vidéo, Vol. 4, numéro 3), j’étais des plus curieux de mettre le produit à l’épreuve.

Description technique
Le XV-Z15000 est un projecteur de taille moyenne avec un fini noir piano. Le style est plutôt élémentaire et après avoir jeté un coup d’œil dans leur section de projecteurs de la série affaires, il n’y a plus aucun doute que le boîtier y est emprunté. Du même coup, certaines caractéristiques ne sont pas vraiment appropriées. La poignée de transport cachée du côté droit (lorsque l’on regarde la lentille) est totalement superflue pour un projecteur dédié au cinéma maison. De plus, la porte coulissante qui cache la lentille n’est pas motorisée. Elle doit donc être déplacée manuellement. Un exercice difficile lors d’une installation permanente au plafond. Il existe aussi des ajustements de trapèze horizontal et vertical ainsi que l’option de rotation. Tous des ajustements qui sont totalement à éviter dans un contexte de cinéma maison ; les artéfacts qu’ils causent étant trop visibles.
La lentille est à l’extrême droite, lorsqu’on regarde l’appareil de face. Les ajustements de zoom et de mise au point sont tous deux manuels. L’appareil ne permet aucun ajustement de positionnement d’image verticale ou horizontale, ce qui peut rendre l’installation problématique dans plusieurs salles. Le zoom est très limité. Pour un écran de 100 pouces de diagonale, le projecteur devra être positionné à une distance variant de 10 pieds 3 pouces à 11 pieds 9 pouces. À cette distance, le centre de la lentille se situera à 8 pouces au dessus de l’écran. Toutes les connexions sont situées à l’arrière de l’appareil : un port RS-232, une connexion composante, une connexion HD15 type PC pouvant également servir de deuxième connexion composante avec l’achat d’un câble adéquat, deux ports HDMI 1.3, une entrée S-vidéo et une entrée composite. Il est aussi possible d’accéder au menu du projecteur directement via les boutons sur le dessus de l’appareil, mais j’imagine que tout comme moi, vous trouverez l’utilisation de la télécommande beaucoup plus efficace. Sharp n’a pas jugé bon de la doter d’un rétro éclairage et c’est franchement malheureux, parce que la télécommande possède plusieurs boutons qui permettent d’accéder directement à des sous-menu sans avoir à naviguer à travers toute la hiérarchie des contrôles à l’écran. Sans rétro éclairage, ces raccourcis sont donc plus difficiles à utiliser.

Calibration mesures
Avec si peu d’options, le nouveau Sharp se doit d’être performant… et il l’est. J’ai été tout de suite surpris par la qualité d’image du projecteur à la sortie de la boîte. En mode naturel, le XV-Z15000 possède une échelle de gris presque parfaite. Une calibration par un spécialiste ne sera nécessaire que pour le plus rigoureux des puristes. La courbe Gamma 1 est tout près du 2.2 recherché. Sharp a eu la brillante idée d’inclure un CMS (Color Management System) que je n’ai pas cru bon d’utiliser, étant satisfait des résultats obtenus par les ajustements de base.

L’utilisation d’un iris dynamique commence lentement à faire son apparition chez les projecteurs à technologie DLP. Ce gadget présent chez la grande majorité des manufacturiers de projecteurs ACL et SXRD, n’est offert que pour une minorité de fabricants de projecteurs DLP. L’effet est évident et les chiffres le montrent bien. Avec l’iris dynamique désactivé, le Sharp ne fait qu’un maigre 1 900:1 (High Contrast et Iris dynamique en arrêt) de rapport de contraste natif. Par contre lorsque que l’iris dynamique est activé, on peut mesurer un rapport de 18 000:1.

Le projecteur produit environ 400 lumens avec la lampe en mode écono et l’option High Contrast activée. Les résultats sont très similaires en mode High Brightness avec un maigre gain de 20 % de luminosité. Si vous voulez d’avantage de luminosité, il faudra opter pour la lampe en mode normal. Le gain est alors de 90 % et permet d’atteindre près de 1 000 lumens. Avec la lampe en mode pleine puissance, vous risquez par contre d’entendre davantage le projecteur car le ventilateur de refroidissement passe en mode turbo.

La lentille est surprenante. L’aberration chromatique était minime sur l’appareil mis à l’essai et l’image  extrêmement précise. Je n’ai pas noté de problème d’uniformité et l’image bénéficiait d’une mise au point parfaite aux quatre coins. J’ignore si j’ai été chanceux ou si chaque appareil possède ce niveau de qualité. Étonnant, considérant le faible coût de l’appareil. Le bloc optique est l’élément le plus coûteux dans les projecteurs haut de gamme. Celui du Sharp est scellé — une autre excellente nouvelle.

Qualité d’image
Ce qui saute le plus aux yeux, c’est la profondeur de l’image chez un DLP. Le Sharp n’est pas étranger à ce phénomène que je ne réussis pas à reproduire aussi bien avec les autres technologies. Je pense que l’image ultra précise et le niveau de contraste ANSI y est pour quelque chose. Le rapport de contraste ANSI est mesuré en affichant en même temps, 8 carrés blancs et 8 carrés noirs. On utilise un Lightmeter pour bien comparer l’intensité des blancs versus les noirs. Cette mesure est difficile à effectuer et est très dépendante de la pièce. La lumière parasite, qui peut être réfléchie par les murs ou le plafond, aura pour effet de minimiser ce rapport de contraste en rendant les carrés noirs moins noirs. Il est donc important d’avoir une salle assez sombre pour diminuer l’effet délavé souvent perçu chez les projecteurs bas de gamme. Ma salle étant optimisée (plancher, murs et plafond noirs) pour maximiser ce contraste ANSI, l’exercice de visionnement devient donc rapidement un pur plaisir.

J’ai utilisé encore une fois la majorité de mes films test. Le film Chronicle of Riddick en HD DVD révèle encore plus de détails, que ce à quoi j’étais habitué sur mon projecteur XV-Z20000 de Sharp. Riddick qui se sauve à toutes jambes du chasseur de prime Toombs, au début du film, est tout simplement à couper le souffle. Les couleurs du film Aeon Flux sont aussi splendides. Le teint des visages est naturel pour chacune des scènes, et ce, quelle que soit la luminosité de ceux-ci, un vrai délice. L’éveil d’Aeon dans sa chambre lui donne un visage un peu rougeâtre, mais rien de comparable au projecteur D-ILA (Digital Direct Drive Image Light Amplifier) testé avec ses couleurs très saturées.

Les parties de hockey étaient elles aussi, visuellement stimulantes. Aucun flou dans l’image causée par une séquence trop rapide de mouvements. La rondelle reste nette et précise à toute occasion. Les projecteurs DLP sont souvent la référence en termes de fluidité de mouvements. Les blancs sont bien rendus et gardent leur subtilité. La glace reste de la glace et on peut voir les marques de patins laissées par le travail intensif des joueurs. J’ai effectué chacun de mes visionnements avec l’iris automatique en marche.
Bien que les changements de luminosité soient visibles à l’occasion, je n’ai pas trouvé les fluctuations irritantes à la longue. L’action de l’iris dynamique est surtout perceptible lorsqu’un texte apparaît soudainement à l’écran. Les premières scènes des films Star Wars sont probablement les meilleurs exemples. Le tout commence avec une vue sur l’immensité de l’espace. Lorsque le texte apparaît, on voit tout de suite que l’espace rempli d’étoiles devient plus gris. L’effet est de plus en plus perceptible, jusqu’à ce que le texte laisse place de nouveau à l’espace infini et que l’iris se referme. Heureusement, ce type de scènes n’est pas représentatif de ce que l’on voit lors de l’écoute de film.

Conclusion
Le projecteur XV-Z15000 de Sharp n’est pas parfait. Le projecteur offre peu de flexibilité, ce qui rend l’installation difficile, voire impossible, pour certaines salles de cinéma maison. L’iris variable est lent et on voit son travail à l’occasion. Par contre, les couleurs sont justes. L’image d’un immense réalisme avec un effet de profondeur est extraordinaire. Son plus gros avantage est sans contredit son prix. Le rapport qualité-prix rend ce Sharp très difficile à battre et un féroce compétiteur dans cette gamme de prix. Si vous êtes un adepte du look DLP et que votre budget est limité, vous pouvez maintenant cesser vos recherches.

Renseignements généraux
Prix: 3 499$ CDN
Garantie: 1 an, pièces et main-d’oeuvre
Distributeur: Sharp Électronique du Canada Ltée,
tél. : 905.890.2100, www.sharp.ca

Médiagraphie
Aeon Flux, HD DVD
Chronicle of Riddick, HD DVD
Star Wars 2 — Attack of the clones, DVD
Spears & Munsil (calibration), Blu-ray
Hockey HD, Illico HD