<!--:fr-->NOUVEL ALBUM – QUATUOR FANDANGO: UAREKENA<!--:-->

Julian Geisterfer
Tobie-Eloi Hinse-Paré
Roberto-Apolinar Martinez-Lissow
Simon Rivet
ATMA Classique, ACD2 2707

Par: Guy Marceau – Collaboration spéciale

Parmi ses parutions de la rentrée, et afin de souligner ses vingt ans d’existence, ATMA a lancé le tout premier disque du jeune quatuor de guitares Fandango. Un clin d’œil à la relève musicale classique avec des musiciens qui ont, à peu de choses près, l’âge d’ATMA. Par ce programme placé sous le titre Uarekena (nom d’un peuple autochtone entre le Brésil et le Venezuela) la formation singulière offre à l’auditeur à la fois un disque de musique savantes et de musiques du monde. Une excellente vitrine pour un premier enregistrement qui n’a, il faut le dire, bien peu de défauts. À part le fait que la durée soit un peu chiche, près de 53 minutes, et qu’on aurait aimé des notes de livret un peu plus fouillées, notamment sur l’œuvre d’Edvard Grieg et les détails de l’arrangement de sa Suite no 1 op. 46 qu’en a fait un certain Jeremy Sparks, ce sont, au final des bémols sans grandes conséquences. Car le choix des œuvres, toutes écrites pour quatre guitares (sauf le Grieg) place l’éclectisme et la découverte au centre du programme.

Le disque débute et se termine avec une composition de Patrick Roux (1962), qui fut leur professeur de guitare au Conservatoire de Gatineau, d’où est issu le quatuor Fandango. D’abord, Comme un Tango, que Roux a dédié à Astor Piazzolla, entre fougue et rêverie dansée, puis Carnaval, portrait festif du Carnaval de Rio. Si la première résonne plus traditionnellement de ses rythmes argentins, la seconde permet au quatuor de rivaliser de virtuosité au fil des traits percussifs et animés de l’ambiance brésilienne débridée de circonstance. Avec Introduction et danse du serbe Dušan Bogdanović (1955), on flotte d’abord librement au son des modes balkaniques, pour danser ensuite dans une polyrythmie qui sonne très XXe siècle. La pièce titre Uarekena, signée par Sérgio Assad (1952) du célèbre duo, est aussi la plus longue du disque. Ancrée dans une modernité accessible, mais inspirée des rythmes d’Amérique du sud, elle offre aux interprètes tous les matériaux pour briller, ce qu’ils font d’office.

Le saut en Norvège n’est pas factice, et l’arrangement de la populaire Suite no 1 op. 46 pour orchestre d’Edvard Grieg ne dépare pas ce disque. Au fil des quatre mouvements, les atmosphères méditatives, introspectives et dansées, jusqu’à la frénésie, montrent quatre interprètes en parfaite cohésion. Idem pour leur version des pages de Leo Brouwer (1939) et ses Paisaje cubano, tout en subtilité minimaliste dans con lluvia, et ce motif répété d’une fine pluie qui tombe, s’intensifie puis s’arrête, et con Rumba, une belle imitation de la marimbula, instrument traditionnel cubain dont les sons métalliques sont produits en intercalant des accessoires entre les cordes à la manière d’un piano préparé, comme l’a fait John Cage. Enfin, Berimbao, du guitariste et percussionniste suisse Jürg Kindle (1960), commande d’utiliser aussi des effets frappés sur les cordes, façon d’imiter le berimbau, un instrument africain. Les couleurs, la richesse des rythmes, et l’éclectisme des œuvres choisies font de ce disque une belle porte d’entrée pour les amateurs de guitares qui en auront quatre fois plus pour leur argent ! Il sera intéressant de suivre les prochaines parutions de ce quatuor aux talents certains. Souhaitons qu’ils se tiennent loin des programmes trop commerciaux ou trop abscons, et qu’ils mettent, comme ici, l’emphase sur la découverte et les œuvres qui vont magnifier ces jeunes cordistes.
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