De gauche à droite, M. Philippe Renaud (Multi Électronique / Audiophile-expert), suivi par les trois ténors: messieurs Jim Fairhead, président, Michel Vanden Broeck, ingenieur-concepteur et Martin Labreque, co-propriètaire.
Le mardi 14 mai dernier, nous étions convoqués à une soirée spéciale chez Multi Électronique à Beloeil. Cet événement hors série des mardis d’octobre nous a permis d’assister à l’une des trop rares présentations des produits Tenor Audio, et ce, ailleurs que dans un salon de haute fidélité. Ce fabricant québécois d’amplificateurs de réputation mondiale est basé à Montréal dans une ancienne usine RCA Victor située dans le quartier Saint-Henri. Comme toujours chez Multi Électronique, l’accueil fut des plus chaleureux et la presse a pu entre autres bénéficier d’une entrevue privée avec monsieur Jim Fairhead président, Michel Vanden Broeck ingénieur et concepteur, de même que Martin Labrecque, un des copropriétaires de Tenor Audio.
Un peu d’histoire
Tenor Audio a débuté officiellement ses activités en 2000 mais la recherche et le développement se sont quant à eux amorcés un peu avant 1998 avec les travaux de l’ingénieur Michel Vanden Broeck concernant un modèle d’amplificateur à lampes OTL de 15 watts par canal dédiés à des amis ou connaissances. Avec l’aide de deux autres investisseurs, un modèle de 75 watts par canal nommé OTL 75 fut présenté pour la première fois au CES en 2001. Ce fut un succès instantané auquel se sont ajoutés de nombreux articles élogieux dans la presse spécialisée. La configuration OTL (Output Transformer Less) permet de s’affranchir des transformateurs de sortie dans un circuit à lampes, ce qui améliore grandement la transparence et la vitesse de réponse du signal audio. Mais celle-ci comporte aussi un certain danger car comme les lampes sont accouplées directement aux haut-parleurs de l’enceinte, il y a risque de passage de courant continu dans leurs bobines mobiles.
Fort de ce succès, une demande grandissante pour plus de puissance et pour une plus grande adaptation à tous les types d’enceinte s’est rapidement fait sentir auprès de Tenor Audio. Avec sa chaleur dégagée et une certaine fragilité envers les impédances constamment variables d’une enceinte, la configuration OTL est rapidement devenue inappropriée et l’on décida alors de concevoir un modèle hybride comportant un circuit d’entrée OTL à lampes et un circuit de sortie à transistors. C’est ainsi qu’en 2003 fut présenté le prototype du bloc monophonique 300M au Salon de Montréal. Les connaisseurs et amateurs de la marque avaient quant à eux de grandes attentes envers ce modèle mais malheureusement, à partir de 2004, l’entreprise a malheureusement dû fermer ses portes en raison de difficultés financières.. Après une période de restructuration et avec la venue de nouveaux investisseurs possédant une expertise diversifiée dans le redressement d’entreprise, Tenor Audio a pu continuer à développer un nouveau modèle monophonique nommée 350M présenté en 2007. Même si ce modèle ressemble comme deux gouttes d’eau à son prédécesseur, le 300M, il s’avère totalement différent dans sa circuiterie et beaucoup plus performant en termes de sonorité et de fiabilité, selon les dires du fabricant. Cette renaissance bien structurée de Tenor Audio lui a également donné la possibilité de développer un préamplificateur de ligne (Line 1) avec son alimentation séparée (Power 1) ainsi qu’un amplificateur stéréophonique un peu moins puissant appelé le 175S. À court terme, on ne prévoit pas produire d’amplificateur intégré, de convertisseur N-A ou de sources pour la musique dématérialisée, mais le fabricant s’intéresse néanmoins à la chose et la porte ne semble pas complètement fermée de ce côté.
Le bloc monophonique 350M
Le poids du 350M est de 67,2 kg, lequel est en bonne partie justifié par son énorme alimentation de 1.875 kVA. Celui-ci utilise 6 lampes en configuration OTL en entrée et des transistors MOSFET (Métal/Oxyde/Semi-conducteur Field Effect Transistor) pour les circuits de sortie en puissance. De leur côté, les circuits hybrides lampes/transistors ne sont pas une nouveauté en soi, mais ce qui caractérise le 350M c’est qu’on a pu conserver la qualité des timbres et la transparence du circuit OTL en les associant à la puissance et le contrôle des transistors. Le savoir-faire acquis par Tenor Audio permet en plus d’annuler la signature sonore des transistors afin qu’ils n’interviennent pas dans celle des lampes. Bref, vous obtenez ainsi le meilleur des deux technologies. Le 350M fonctionne en pure classe A pour les premiers 10 watts et les transistors prennent ensuite la relève en classe A/B pour délivrer jusqu’à 350 watts dans une impédance de 8 ohms. Cette puissance est doublée à 4 et 2 ohms, ce qui donne respectivement 700 et 1 400 watts. Une telle puissance permet de voir venir à peu près n’importe quelle enceinte sur le marché, y compris les plus gourmandes.
À l’écoute de ces trois « Ténors »
Lors de la soirée chez Multi Électronique, nous avons eu le privilège d’assister aux prouesses d’une paire de 350M associée à son préamplificateur Line 1 accompagné de son alimentation externe Power 1. Il n’est jamais évident d’évaluer des composantes Hi-Fi dans une acoustique qui ne vous est pas familière et surtout lorsqu’elles sont associées à d’autres appareils que vous n’avez jamais ou presque pas entendus. Les autres éléments de la chaîne étaient toutefois d’une qualité irréprochable dont un lecteur Esoteric X01-D2 de Teac et des enceintes Stella Utopia de Focal.
La trop brève écoute de ce trio Tenor Audio a malgré tout été des plus impressionnantes. Dès les premières minutes, les mots qui nous viennent à l’esprit sont transparence et rapidité d’exécution. On a l’impression que le signal audio passe directement de la source aux enceintes, comme s’il n’y avait aucune électronique intercalée entre ces deux éléments. À la vue de ces trois appareils Tenor Audio bourrés de circuits électroniques, de dimensions imposantes et de poids conséquent, on se demande comment leur concepteur est parvenu à les faire s’effacer, voire disparaître dans le processus de la reproduction musicale. Dans ces conditions d’écoute, il ne nous vient même pas à l’idée de décrire séparément la portion des hautes, moyennes ou basses fréquences car le tout est tellement cohérent, que votre cerveau quitte le mode analyse pour ne se laisser emporter que par la musique. Pour me faire une idée plus précise de la sonorité ou de la « non sonorité » de cet ensemble Tenor Audio, il me faudra l’entendre à nouveau et plus longuement, et ce, dans des conditions favorables. Avec une telle capacité à s’effacer devant la musique, ces appareils ne vous cachent rien et il faudra veiller à bien les entourer. En parallèle, je peux comprendre pourquoi certains chroniqueurs audio ont dit de l’amplificateur monophonique 350M «qu’il est ce qu’ils ont entendu de mieux». La mission de Tenor Audio n’est rien de moins que de produire les meilleurs amplificateurs au monde. Si ce but n’est pas encore atteint, les trois « ténors » que j’ai pu entendre ce soir-là étaient selon moi dans le cercle fermé des meilleurs au monde. Il ne reste plus qu’à leur trouver un bon auditorium.
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