<!--:fr-->Disque CD : Tango Boréal – Pampa Blues<!--:-->

Par Guy Marceau – Journaliste

Le blues du cowboy
Décidément, Tango Boréal n’a pas fini de nous surprendre. Le trio singulier déploie ses mélodies et harmonies épatantes au service d’une écriture expressionniste qui nous plonge dans l’esprit des gauchos, comme une incursion dans l’univers caractéristique des membres de Tango Boréal qui chevauchent leur monture dans les plaines arides. Parce que Pampa Blues, c’est, aux dires du bandonéoniste Denis Plante, une ballade à cheval, d’un bout à l’autre des Amériques. La nostalgie sonore du bandonéon, l’exquise guitare de David Jacques et la contrebasse de Ian Simpson s’éloignent bellement du tango traditionnel, sans pour autant jamais le quitter.

Dans Le Mat, il ne manque que les mariachis avec des inflexions doucement dansées, alors qu’Organito recrée subtilement et habilement, l’orgue de barbarie qui fut certainement un porte parole sonore et caractéristique de l’instrument à soufflet. Ailleurs, car c’est bien là que nous emmène Tango Boréal, les accents du blues du titre incitent au farniente (Pampa blues, Caradura, La Catalina) et favorisent la détente voire l’oisiveté sous la chaleur du Sud. Et avec Expatriado, la nostalgie des départs frôle la tristesse dont on envie le ressentir.

Sur Pampa Blues, les atmosphères bien typées se succèdent comme autant de petits tableaux expressionnistes bien ciselés. Au fil des compositions originales (sauf Ciudad, extrait du Concerto symphonique pour guitare et bandonéon « Noche de tango » d’Astor Piazzolla), on a envie justement de rester en selle, de profiter du paysage, de voir loin, et d’avoir un peu de sable dans la bouche soufflé par les vents chauds. Si le cœur vous en dit, tendez l’oreille sur Tango romance, puisqu’à l’instar du cinéaste qui doit réaliser un plan séquence, Denis Plante nous dit « avoir voulu composer la plus longue phrase de l’histoire du bandonéon, une ascension sur six mesures qui mène mon soufflet usé aux limites de son extension. »

Il faut savoir aussi que La vanité de Dédale, d’une belle étrangeté, est tirée de Le Poète : la bibliothèque interdite, un opéra-tango, dont Denis Plante a signé les musiques, inspiré de la vie de Jorge Luis Borges et présentée avec les Violons du Roy en octobre 2013. Et aussi que La Vadrouille et Ménage à trois sont des pastiches qui complètent le cycle présenté sur le disque Summer Music de l’ensemble Pentaèdre. Au final, le trio nous fait grâce de deux tangos bien sentis, Mascarade et Astorias, en hommage au maître argentin Piazzolla.

Tout est extrêmement séduisant, bien fait, et l’osmose entre les musiciens fait encore mouche. Ici, pas de mouche du coche ! Et les chevaux ne risquent pas de mourir de soif, car on est vraisemblablement plus dans la contemplation que dans la poursuite endiablée, Et c’est très bien ainsi. Magnana, magnana

*** Tango Boréal offrira son concert-lancement à Montréal le 6 décembre prochain à 20h, à la Salle Maisonneuve de la Place des Arts.

Étiquette: ATMA Classique, ACD2 2706
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