BUDDY GUY  The Blues Don’t Lie

RCA Records, 19658-73152-2

Buddy Guy n’a plus besoin de présentation. Il est un lien vivant, original, dynamique entre le blues électrifié du Sud, de Muddy Waters, Willie Dixon et Howlin’ Wolf de l’après-guerre à Chicago, et le blues rock et le blues psychédélique des Hendrix, Clapton et autres. The Blues Don’t Lie de Buddy Guy, c’est l’album d’une vie, de mémoire vive et sentie, jusqu’à aujourd’hui. Ce sont aussi des réflexions en chansons et en blues sur le monde actuel qui n’a jamais eu autant besoin d’amour, tel qu’exprimé dans The World Needs Love, la seule composition entièrement de Guy, sur cet opus. Cette nouvelle parution est un assemblage dense et réussi d’ancien et de nouveau, de titres originaux et de covers, de styles musicaux personnels qui dépeignent la vie d’un artiste et des faits de la vie et du feeling qui n’ont eu de cesse de s’ancrer dans la tradition du blues. De par son jeu si intense et unique, l’as louisianais de la six cordes est aussi un guitariste avant-gardiste, un inspirateur de la mutation du blues vers le rock des années 1960 et 1970. En 1967, il est invité au Mariposa Folk Blues Festival de Toronto où il reçoit un accueil si chaleureux de jeunes Canadiens parce qu’il était celui qui avait joué avec Muddy Waters, me dira-t-il en entrevue pour Les Amis du Blues en 1997. Il avait été profondément touché et marqué par les égards si enthousiastes de ce public qui scandait son nom que, de retour à Chicago, il abandonne son travail de jour dans une station-service pour ne se consacrer, alors, qu’au blues à temps plein. Puis, après des hauts et des bas et de substantiels passages à vide, il y a l’album Stone Crazy sur Alligator Records (1979), suivi d’autres périodes moins fastes, jusqu’à Damn Right I’ve Got the Blues, en 1991.

Depuis lors, sa régularité discographique et ses succès professionnels sont au rendez-vous. À partir de Skin Deep en 2008, il fait équipe avec le réalisateur Tom Hambridge, batteur, auteur-compositeur, artiste solo, et sa formidable équipe. Ceux-ci le soutiennent et l’alimentent si bien qu’il bondit sur les sommets du blues avec une énergie renouvelée. The Blues Don’t Lie, son sixième album studio depuis Hambridge est un nouvel accomplissement de créativité, de pertinence et de savoir-faire. Il s’agit d’une proposition généreuse de seize titres qui offrent un condensé actuel de toute sa carrière. Cela va du Swamp Blues louisianais I’m A King Bee de Slim Harpo, joué avec sa guitare acoustique Martin, jusqu’à ses blues actuels à saveur et à contexte contemporains. Les textes sont plutôt rarement de sa plume seule, mais ils sont excellents, reliés et connectés à son univers expérientiel, de même qu’à sa vision du monde, de la société et des relations humaines. Sa guitare ultra-expressive, souple et adaptable s’occupe d’animer le tout et de faire la conversation comme il le joue et le chante dans la pièce d’ouverture, I Let My Guitar Do The Talking. The Blues Don’t Lie, la pièce-titre qui suit est truffée d’intéressantes anecdotes et est signée Tom Hambridge. Celui-ci agit souvent en collaboration d’écriture, notamment, avec Richard Fleming et Gary Nicholson qui cosignent plusieurs titres de cette nouvelle parution. Les résultats sont probants. Cet album est si riche d’expériences, de styles, d’apports de contributeurs aux textes et à la musique, d’artistes invités, dont les légendaires Mavis Staples et Bobby Rush, qu’il pourrait être considéré comme un legs artistique substantiel et actualisé du bluesman George Buddy Guy de Lettsworth, Louisiana.

Par sa fidélité à la tradition, son ouverture aux gens et sur le monde actuel, son sens dynamique du jeu et de l’innovation, Buddy Guy, racines aux pieds et blues au cœur, c’est, pour moi, l’Ambassadeur du Blues avec un grand A !

https://www.buddyguy.net/